Tout au long de sa carrière extraordinaire, Steve Jobs a imposé un leadership étonnant qui va à l’encontre des toutes les bonnes pratiques enseignées dans les grandes écoles de Management (en particulier Harvard que Jobs méprisait), et qui se pratiquent dans le quasi-totalité des entreprises du secteur technologique.
Quelques exemples:
– Une culture d’entreprise basée sur le secret absolu (contre la transparence) et le renfermement:
- pas de participations des salariés aux networking de la Silicon Valley,
- aucune communication interne sur les projets en cours,
- collaboration entre départements réduite au minimum,
- cerveaux des collaborateurs quasi-formatés au sein de la très discrète Apple Academy…
– Steve Jobs a veillé à maintenir l’esprit start-up dans un groupe de 40,000 employés:
- Chaque département, devait se concentrer et déployer sa créativité sur une seule tâche sans se soucier des autres parties du déploiement.
- Seul, Jobs avait dans l’entreprise une vision complète des différents projets en cours et la connaissance de l’objectif final (un produit d’exception).
- Limitation des réunions et divers conseils, comités exécutifs, équipes restreintes… afin de permettre des prises de décision rapide et de provoquer l’urgence permanente
– Un management des Ressources Humaines quasi-archaïque, proche du paternalisme:
- aucune possibilité de progression interne, aucun plan de développement, aucune responsabilisation,
- sous-valorisation des compétences, ré-appropriation par Jobs des meilleures intuitions de ses collaborateurs,
- humiliation publique, pression incroyable et tyrannie du leader,
- hyper-concentration des employés sur une mono-tâche,
- salaires élevés mais pas au-dessus de la concurrence…
Et pourtant, Steve Jobs a attiré l’excellence des ingénieurs, logisticiens et designers de la planète. Steve Jobs exigeait des ses collaborateurs une dévotion au produit (plus qu’à la marque en elle-même) quasi absolue sans contre-partie de la part d’Apple. Sa réussite s’explique par une attention toute particulière portée au recrutement, auquel il consacrait lui-même du temps pour les postes les plus importants.jobs privilégiait la passion et l’expérience des candidats plus que leurs diplômes.
– Un management du personnel très froid:
- pas de salons de détente comme chez Google ou chez la plupart des start-ups,
- pas de repas offert à la cantine ou de pizzas livrées le soir…
- pas d’open-spaces conviviaux mais des bureaux fermés pour limiter la collaboration entre départements
- pas d’initiatives sociétales.
Cependant, tous les salariés reconnaissent avoir vécu une expérience humaine extra-ordinaire en travaillant pour Jobs.
– Rejet de la diversification des activité avec une hyper-concentration de toutes les équipes sur un produit unique pour lequel l’entreprise prend tous les risques.
– Désintérêt pour les investisseurs et des actionnaires qui n’ont aucun impact sur la stratégie et les décisions de l’entreprise:
- financièrement parlant, Apple a été gérée à l’opposé de tous les grands groupes capitalistiques, presque comme une PME: pas de dividende versé aux actionnaires, fonds de roulement privilégié, etc.
- On sait que Jobs ne portait que peu d’intérêt à la réussite financière (contrairement à Bill Gates) et voulait que l’histoire se rappelle de lui comme un artiste (le designer de produits exceptionnels) et non comme un chef d’entreprise.
– Mépris des communiquants extérieurs, des journalistes, des influenceurs, des universitaires et économistes… mais aussi des autres sociétés high-tech…
– Culte de l’excellence, respect du leader charismatique (plus que de l’amour proprement dit)
– Le design du produit impose ses contraintes à la fabrication et à la logistique, et non l’inverse.
etc.
à lire, le passionnant ouvrage:
Lashinsky, Adam. Inside Apple: de Steve Jobs à Tim Cook, dans les coulisses de l’entreprise la plus secrète au monde. Paris: Dunod, 2013. 262 p. ISBN 978-2-10-059419-1